Appel à communication > Axe 1 : De quels problèmes la jeunesse (la juvénilisation ?) est-elle le nom ?

Une approche traditionnelle et objectiviste des politiques publiques tend à les présenter selon un modèle séquentiel dans lequel se succèderaient l’identification d’un problème, sa mise en agenda, la formulation d’une solution, et enfin sa mise en œuvre. Dans cette optique, ce serait l’émergence d’un ‘nouvel âge de la vie’, la jeunesse (Galland 2011), avec ses problématiques et mobilisations propres, qui aurait justifié l’émergence de politiques publiques spécifiques.

Ce schéma séquentiel a toutefois été remis en cause au nom d’une approche constructiviste des problèmes publics (Neveu 1999) qui souligne combien ce sont autant les dispositifs d’action publique qui configurent les problèmes auxquels ils répondent que l’inverse. En l’occurrence, en matière de jeunesse, on ne peut que constater que, même si les dispositifs mis en place au titre des politiques publiques de « la » jeunesse sont en théorie ouverts à tou.te.s, ils tendent à viser particulièrement certains “jeunes”, considérés comme éloignés de toute forme de participation (politique, culturelle, sportive), du marché de l'emploi, ou ayant des pratiques perçues comme "problématiques", par exemple pour ce qui concerne leur rapport aux médias et au “numérique”. À travers des politiques publiques dédiées ces « publics institutionnels » (Ollivier-Yaniv 2018), parfois désignés comme « NEET » (Not in Education, Employment or Training), sont cependant aussi présentés en tant que « ressources » (Vulbeau 2001), disposant de la capacité à affirmer leur personnalité, à mettre en avant leurs compétences et leurs talents (et à les mettre au service de la collectivité ou à “l’entreprise de soi”). Il s'agirait alors, à travers ces politiques, de leur donner "un coup de pouce », de les aider à « s'émanciper », voire à les "raccrocher" aux institutions. Si on prend l’exemple des politiques en matière de citoyenneté ou en matière d’empowerment, on constate en réalité une forte variété des objectifs poursuivis, allant de l’engagement bénévole à des formes déguisées de (re)mise au travail. Ces différents objectifs laissent penser que la catégorie « jeunesse » est mobilisée pour répondre à des problèmes qui dépassent le seul cadrage sur une catégorie d’âge, aussi bien pour le public ciblé (insertion professionnelle) que pour les structures qui portent les dispositifs (constitution de réseaux, métropolisation et infléchissement des rapports institutionnels locaux de pouvoir, recherche de financements, clientélisme, « disciplinarisation » de la jeunesse……).

La labellisation “jeunesse” d’un programme politique semble dès lors pouvoir répondre à des objectifs très diversifiés, parfois assez éloignés de la population-cible elle-même.

Les contributions relevant de cet axe auront pour focale d’interroger les « problèmes » qui sont visés derrière ces politiques labellisées « jeunesse » ?

Qui sont les jeunes pour lesquel.le.s on dit vouloir mettre en place des politiques spécifiques ? À quels problèmes sociaux souhaite-t-on répondre ? Dans quelle mesure ces problèmes sont-ils spécifiques à la jeunesse ? Dans quelle mesure « juvéniliser » une politique publique est-il un moyen d'atteindre, concomitamment ou concurremment, d'autres objectifs que le public ciblé ou que les objectifs les plus explicites ?

En somme, dans quelle mesure la jeunesse est-elle un moyen ou une fin des politiques publiques dites ‘de la jeunesse’ ?

 

Les travaux interdisciplinaires seront particulièrement bienvenus ainsi que des études qui portent sur des terrains nationaux ou internationaux variés.

Personnes connectées : 3 Vie privée
Chargement...