Gouvernance et sectorisation des politiques publiques à destination des étudiants : analyse des dispositifs du logement étudiant dans la Métropole de Lyon
Chloé Morhain  1  
1 : LAET (UMR CNRS 5593)
Université de Lyon

MORHAIN Chloé - Aménagement, Université de Lyon, LAET (UMR CNRS 5593)

Introduction

Cette communication s'intéresse à une période précise de la population jeune, les étudiants. Considérés comme une population jeune et homogène dans les politiques de jeunesses (Lima, 2012), la période des études est souvent décrite comme un âge transitoire, une période d'apprentissage (Coulon, 2017) et de socialisation (Collet et al, 2019). Or les populations étudiantes se démarquent par une grande hétérogénéité de profils et de pratiques (Cordazzo et Tenret, 2010), si bien que l'étudiant type n'est pas forcément un jeune bachelier sorti du lycée. Souvent interrogé dans la littérature scientifique dans différentes disciplines, les populations étudiantes restent un sujet finalement peu abordé dans le champ de la sociologie de l'action publique, c'est pourquoi nous proposons cette analyse de la co-construction des politiques territorialisées en direction des étudiants.

Depuis les années 1960, on assiste à un accroissement constant des effectifs étudiants (Albouy et al, 2007), encore accentué depuis les années 2000, ainsi qu'à des mutations continuelles de la carte universitaire en France (Baron, 2010). Aujourd'hui les populations étudiantes représentent une part considérable des populations des grandes métropoles françaises – plus de 150 000 étudiants à Lyon par exemple, soit environ 1/10ème de la population (SDU 2015-2020) - et ce sujet gagne en importance sur le plan des politiques locales. De nombreuses actions spécifiques ont été menées dans un premier temps à l'échelle nationale, puis déclinées à l'échelle locale comme le Plan Campus, ou le Plan 40 000 puis Plan 60 000. Localement, les étudiants se trouvent dès lors au cœur de différents dispositifs souvent traités par le prisme des universités sur les territoires, mais de manière éclatée en fonction des thématiques abordées et des secteurs de l'action publique concernés (logement, transport, urbanisme, social, santé par exemples).

En reprenant le cas de l'élaboration du premier Schéma de Développement Universitaire (SDU) de la Métropole de Lyon, cette communication cherchera à analyser et comprendre comment une politique dédiée aux populations étudiantes a pu être progressivement désectorialisée (à travers le document du SDU) puis re-sectorialisée sur la thématique du logement avec une instance spécifique de décision partenariale. Nous présenterons dans un premier temps introductif les acteurs et leurs compétences dans l'écosystème très éclaté des politiques étudiantes. Puis nous analyserons la désectorialisation de la politique étudiante lyonnaise à travers le SDU depuis 2010, et la mise en place de la gouvernance du logement à partir de 2012 jusqu'à son fonctionnement aujourd'hui (gouvernance entendue ici au sens « d'un processus décisionnel d'un projet partagé duquel chacun ressort gagnant » (Muis, 2014)). Cette proposition de communication s'inscrit dans l'axe 2 du colloque « co-construire les politiques publiques territorialisées en direction des jeunes ».

Méthodologie

Le terrain de notre étude est la Métropole de Lyon. Différentes méthodologies seront mobilisées dans le cadre de cette présentation. Nous utiliserons dans un premier temps des documents issus de la littérature grise interne à l'institution métropolitaine comme des schémas, délibérations, et documents de travail interne. L'accès à cette littérature grise pourra être facilité par la posture de la doctorante en tant qu'agent par un dispositif CIFRE au service Déplacements et impliquée sur différents projets où il est question des populations étudiantes. Nous mobiliserons également un panel d'entretien qualitatif semi-directifs réalisés auprès d'acteurs locaux : métropole, région, universités, et agence d'urbanisme afin d'éclairer les spécificités de la gouvernance locale du logement étudiant. Ces entretiens ont été réalisés entre Avril et Octobre 2020, une partie en visioconférence du fait du confinement et de la crise sanitaire actuelle et une partie en présentiel sur le lieu de travail des acteurs. Ces entretiens abordent différents sujets comme l'historique professionnel, la transversalité des politiques publiques, les projets spécifiques aux étudiants et le rapport à l'expertise chez les acteurs interrogés. Après une retranscription intégrale des entretiens réalisés, nous procéderons à une analyse thématique des entretiens avec une analyse particulière des questions de gouvernance.

Principaux résultats attendus

Cette analyse de la co-construction des politiques territorialisées à destination des étudiants conduit à différents résultats. La gouvernance locale sur le logement étudiant semble relativement bien fonctionner du point de vue des acteurs parties prenantes. Cette gouvernance et son rôle dans la politique du logement à échelle locale est détaillée dans le discours de nombreux acteurs, et décrite comme un modèle efficace. Nous reviendrons sur les critères de réussite et d'efficacité mis en avant par les acteurs. Au-delà du sujet du logement étudiant, les modalités de cette gouvernance pourraient être reprises localement pour d'autres thématiques comme la mobilité étudiante, à l'occasion de l'écriture du nouveau Schéma de Développement Universitaire lyonnais prévu pour 2020. Il semble également qu'à échelle nationale, différents autres acteurs métropolitains souhaitent s'en inspirer pour leurs modèles locaux. Cet éclairage spécifique au terrain lyonnais pourra être l'occasion d'analyser la définition de la population étudiante mise en œuvre par la Métropole à travers de tels schémas. À partir de cette description du modèle de gouvernance par les acteurs, nous nous attacherons à présenter les limites de cette co-construction et les enjeux à venir pour d'autres politiques territorialisées en direction des jeunes comme le Schéma de Développement Universitaire.

Bibliographie : 

Albouy, V., & Tavan, C. (2007). Accès à l'enseignement supérieur en France : une démocratisation réelle mais de faible ampleur.

Baron, M. (2010). Les transformations de la carte universitaire depuis les années 1960 : constats et enjeux. Le Mouvement Social, 233(4), 93-105.

Collet, X., Froment, B., & Gatesoupe, M. (2019). Regards croisés sur les expériences étudiantes. Les temps étudiants, des articulations variées selon les disciplines pour des socialisations distinctes.

Coulon, A. (2017). Le métier d'étudiant : l'entrée dans la vie universitaire. Educação e Pesquisa, 43(4), 1239-1250.

Cordazzo, P., & Tenret, É. (2010). Regards croisés sur les expériences étudiantes. Chapitre 18 L'économie étudiante.

Lascoumes, P., & Le Galès, P. (2018). Sociologie de l'action publique-2e éd. Armand Colin.

Lima, L. (2012). Politiques d'insertion et citoyenneté sociale des jeunes. Politiques de jeunesse : le grand malentendu, Nîmes, Champ social éditions.

Muis, A. S. (2014). Territoire, identité et gouvernance : quelle équation pour un développement durable?. Cybergeo: European Journal of Geography. Schéma de Développement Universitaire (2010-2020), Métropole de Lyon.

 


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